NAKA59
Poésie sans fin
Un
rendez-vous impressionnant
Rien de plus
sérieux
Que cette
fleur
Dorée de
patience
Glorieuse
dans son cadre
Immense de
contenu
Qui a vu le
jour
En cette
tiède matinée
Où nul
jardinier ne fut invité
Rien de plus
étonnant
Qu'une fleur
de paix
Qui pousse
en toi
Oh terre
oubliée
Ce jour là
Je ne me
réveillais pas en sursaut
Ce jour là
Je n'ai vu
que ce que je pouvais voir
Et depuis
Je n'ai
cessé de t'observer
Et toi
Tu n'as
cessé de me fasciner
A chaque
fois qu'une nouvelle fleur
De ta pureté
jaillit
Toulouse,
le 30 septembre 1988
~~~~~~~~~~~~~~~~
Le chergui d'un soir
Le
chergui de ce soir
Sans
doute
A
fait envoler toutes les envies légères
Changé
les directions des navires
Chassé
tant d'indécis
Et
brûlé leurs fantasmes politiques
Comme
tous les soirs
Il
a dû secouer les cœurs sensibles
Et
créer pour les amoureux
Un
idéal de lutte
Et
encore une fois
L'air
me remplira les poumons
Le
désir de m'envoler me prendra
Et
je partirai dans mes rêves
Plus
profondément que jamais...
Je
survolerai la terre entière
Je
serai à la fois n'importe où je désirerai
Je
ne demeurerai prisonnier que de mes pensées
Je
pourrai traverser les barreaux, y
voler la vérité
Plonger
au fond des mines, sentir
ta sueur
Me
transformer en poussière, découvrir
ta propreté
M'allonger
dans les champs, réaliser
ton ardeur
Ainsi,
au bout de mon voyage
Ce
mal de tête deviendra bonheur
Car,
aussi proche de l'utopie soit-il
Le
chergui de ce soir
Aura
effacé toute mon hypocrisie
Toute
ma mort
Tanger, le 18 août 1988
~~~~~~~~~~~~~~~~
L'arme poésie
Maladresse
innée constituée maladroitement
Ingénieuse
idée palpitant avec le cœur
Image sentie
comme un soir falsifié
Amour créé
tant que besoin existe
Existence
supposée supposant le ciel
Dieu fixé
annonçant vos malheurs
Trésors
figés comme le mal et le bien
Cascades
usées et l'usage des forces
Fleuves sans
soupçons et la mer calme
Pour calmer
les maux, des mots acclamés
Aucun sens
que des proverbes perdus
Que la rime
revêtue de paroles mouillées
Chanson d'esclave
chantant en grandiose
Mythe de
Calabre de l'enfant rêveur
A pas de
géants vers une maigre issue
Le cœur
battant au rythme des ailles
L'espoir
raisonnant dans les creux de la tête
Les étoiles
brillantes guides du fruit
Sans aucun
effort se perd le paradis
A tord ou à
raison on jette le fusil
Délicieuse
arme la poésie de la vie
Valenciennes,
le 25 mai 1989
~~~~~~~~~~~~~~~~
Théorie des bouts : la question
Un jour, tu partiras …
Toi aussi,
Comme d'autres l'ont déjà fait.
Que deviendras-tu ?
Que saurais-tu des autres ?
Ah, si au moins tu avais des certitudes !
Je suis sûr que, de la vie des autres,
J'ai une vue, une perception.
Peut-être pas tous les jours…
Ou parfois pas du tout…
Les autres vivants ne me verront plus.
Ça c'est sûr.
Ou par l'intermédiaire d'esprits.
Moins sûr.
Penseront-ils au moins à moi ?
Parfois.
Puis, de moins en moins.
Durant combien de temps ?
Et leurs enfants ?
Et les petits enfants ?
Ainsi est fait le temps.
Le temps est oubli.
Alors on essaie d'inventer,
D'écrire pour être connu,
De prendre des galons,
D'ériger des statues.
Les plus naïfs essaieront simplement
De marquer des pierres
A défaut de graver des esprits.
La plupart tentent de croire en des idéaux,
De forger des convictions
En l'absence de compréhension.
Mais, que comprendre ?
Sur quoi ?
Pendant combien de temps ?
Ah le temps !
Avant le temps.
Après le temps.
Quel temps ?
Le mien ?
Le tien ?
Le nôtre
Relayé
Transmis
Génération après génération…
Depuis longtemps.
Très très longtemps.
Et pourtant, personne n'a compris le temps.
On se fabrique des échelles,
Des sciences,
Sans jamais réussir à joindre les deux bouts.
L'Homme a réussi à fabriquer
Ses propres échelles,
De plus en plus longues,
De plus en plus sophistiquées,
Mais jamais suffisamment pour atteindre un bout.
Nous sommes tous obsédés par les bouts :
Big bang ou jardin d'Éden,
Jugement dernier ou réincarnation…
Mais quel est ce besoin de référence ?
D'où vient-il ?
Comment finira-t-il ?
Toujours cette question ?
Si nous savions situer au moins un bout ?
Et s'il n'y avait aucun bout ?
Lille, le 24 mai 2001
~~~~~~~~~~~~~~~~
Le
sourire délaissé
Il est là,
ou dans l'au-delà
Je l'attends,
il ne viendra pas
Il ne donnera
aucun rendez-vous
ou dans l'au-delà
Je l'attends,
il ne viendra pas
Il ne donnera
aucun rendez-vous
aucun
espoir
aucun malentendu
aucun entendu
Je pars dans l'univers des recyclages
Lui, il
ne viendra pas
Une flamme me pourchasse
Mon
instinct me dépasse
Et
j'entends siffler mon arme, au loin
Et je
perds mes dents, ma foi
Mais lui, il ne donnera
aucun
rendez-vous
aucun
espoir
un
malentendu,
peut-être
Vient le soir
où
disparaissent les illusions
où
je retrouve mon miroir
Vient le soir
dont
mes craintes s'éparpillent
on
peut le voir dans le noir
Et lui, ne donnera
aucun
rendez-vous
aucun
espoir
C'était à moi d'aller le chercher
C'était
entendu
Mons en Baroeul, le 30 septembre 1989
~~~~~~~~~~~~~~~~
Désarroi
Les tornades et les vents sauvages
Sous un visage habillé
Règnent sans nulle parole
Sur un monde éparpillé
A l'image de tout naufrage
La terre reste mouillée
Et le ciel en rigole
Comme si on l'avait chatouillé
Et vous qui êtes en rage
Comme un char rouillé
Les temps vous ramollissent
Vous distinguent du lévrier
Par ces dizaines de voyages
Tu n'as fait que balayer
Une par une tes paroles
De la poussière oubliée
Maintenant il reste des cages
A chaque maison fouillée
Tous ces oiseaux qui volent
Ne reviendront plus s'y marier
Une par une, mes pages
Dans un vieux livre plié
Témoignent de ma crainte folle
D'un long roman gaspillé
Lille-Valenciennes, le 31 janvier 1990
~~~~~~~~~~~~~~~~
Portraits
Serein
Il
ne craint rien
Ni
dieu, ni commandant
Ni
famine, ni bâton
Ne
crie jamais
N'a
pas de remords
Même
sous l'eau
Peu
encore mordre
Espèce très rare
Sauf chez les poissons
Pour ses
riverains
Il
est solitaire
Ne
parle jamais
Que
pour faire taire
Sa
foi est un mystère
Son
foie souffre de la guerre
Même
si les anges se mettent à boire
Lui
ne peut contester les lois
Mammifère non affilié
Courant mais non identifié
Il
se partage tout
Quand
il veut prendre
La
part des autres
Il
peut se vendre
Son
derrière ne cesse de grossir
Car
tout ce qu'il y met
Ne
peut sortir
Et
n'a aucun temps pour réfléchir
Animal ou humain
A vous de choisir
Tanger,
le 22 août 1989
~~~~~~~~~~~~~~~~
à suivre ... POESIA ESPANOLA
NAKA59